Catégorie : Footing de touriste

Dans les pas des Maîtres sonneurs – Semaine 28 #1

Aux alentours du 14 juillet, tous les ans ou presque, on a une tradition dans la famille. Perpétuée par nos parents, c’est désormais ma sœur et moi qui accomplissons le rituel: nous allons aux rencontres internationales des luthiers et maîtres sonneurs, plus connues sous le nom officieux de « festival de Saint-Chartier ». Auparavant situé dans le village de Saint-Chartier en Berry, ce festival, comme celui d’Avignon, avait son « in », dans le parc d’un château, et son « off » dans les rues et bars dudit village. Mais les cracheurs de feu et soulards du petit jour ont eu raison de la patience des habitants, qui ont exigé le déplacement des manants. C’est à présent un festival plus encadré, toujours dans le parc et la forêt d’un château (en Berry, ça ne manque pas !), sans « off ». Mais il a su conserver l’ambiance des années de sa création, ces années 1970 qui ont vu ressurgir le folk et la musique traditionnelle en Europe.

Il réunit des passionnés du monde entier, des luthiers, des musiciens, des danseurs. Et l’esprit de George Sand, auteur du roman « Les maîtres sonneurs », plane toujours sur la maison de Nohant, à quelques enjambées de là. A Saint-Chartier (« château d’Ars », je ne m’y fais pas, pour moi ça restera toujours « Saint Chartier »!), on écoute de la musique venue d’ailleurs, on boit, on rigole avec les amis, on mange de la super cuisine bio et des crêpes sorties d’une roulotte, on danse et on chante — on chante beaucoup. Certes, il ne faut pas être allergique à la cornemuse et à la vieille à roue, instruments phares de ces rencontres, car on en croise à tous les coins de sentiers, le matin en sortant de la tente, le jour durant, le soir en rentrant au bercail. J’y ai beaucoup dansé, à Saint Chartier, mais je n’y avais encore jamais couru. C’est désormais chose faite avec Nicolas.

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Comment j’ai rencontré l’été

Je rentre ce soir d’une sortie de 40 minutes avec Nicolas autour de la Pièce d’eau des Suisses. Une petite mise en jambes avant ce qui l’attend demain : le trail de Sully dans la forêt de Rosny-sur-Seine, version 35 kilomètres/1000 D+. Je l’accompagne en prenant le départ de l’épreuve de 10 kilomètres/300 D+ avec pour objectif de profiter du paysage et de ne pas trop tirer sur le genou. Les organisateurs annoncent : « Chemins vallonnés  et sentiers agréables, néanmoins techniques et sélectifs. Paysages bucoliques, point de vue sur les méandres de la Seine, parcours 100% nature . » Et Joël Collado prévoit du beau et du chaud. A nous un petit matin vert dans le bonheur de l’effort (comment ça, c’est dimanche ??)

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Un an de course à pied

Cet étrange signe des hommes dans le ciel lillois, anachronique, croisé à plusieurs reprises près de la Grand’Place et dans le quartier de la fac de droit, se trouvera en bonne place dans mon ch’ti coeur de newbie. Car ce week-end à Lille, j’ai quelque chose à fêter. Voilà maintenant un an que je me suis mise à courir.

J’ai déjà relaté cette première sortie au stade de Beaublanc à Limoges, avec mon amie Aurélie — que mille pluies d’or lui tombent sur la tête et que sa descendance soit nombreuse. Dans une lente progression, après des blessures, une reprise sous la houlette de mon podologue et des sorties régulières, me voilà parvenue à un premier pallier avec ces deux heures de course et presque vingt kilomètres (et 227 D+, comme j’en suis fière!) franchis à l’Ecotrail de Paris le 26 mars dernier. Outre la durée et la distance, j’ai également perdu environ 10 battements par minute sur mon rythme cardiaque en course depuis octobre 2010, et gagné 2 minutes au kilomètre en endurance fondamentale depuis l’été dernier. Je devrais pouvoir améliorer mon temps sur 10 kilomètres le 1er mai prochain à Boulogne: il est pour l’instant de 58’46 et date des 10 kilomètres de Paris Centre, en octobre 2010.

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Trail des monts et merveilles : podium à l’envers !

Cela faisait plus de douze années que je n’étais  pas retournée au village. Non pas celui qui m’a vu naître, mais celui dans lequel j’ai vécu mon enfance et une partie de mon adolescence, de 6 à 16 ans. J’y ai appris à lire, à faire du vélo et de la mobylette, j’y ai vécu des amours et des amitiés et des drames, passé des heures dans les bois, l’église et les champs : Compreignac.

Seb dit « Marko », coureur limougeaud rencontré sur Facebook (le même qui a écrit ici le récit de sa Saintélyon), m’avait parlé de cette course : le Trail des Monts et Merveilles, une première édition conduite par un passionné de ces bois de Maudan et de La Vauzelle. Je ne pouvais pas manquer ce rendez-vous et conviais Noostromo et Aurélie « de Limoges » à vivre cette expérience avec moi.

Le réveil dominical ne fut pas évident, après une soirée passée au Petit Coudier (un café-concert mythique des Monts d’Ambazac où les étoiles furent scintillantes et les musiciens de French Swing Kiss fantastiques). Mais j’étais heureuse de partir courir à travers mes racines. Arrivés à 8h45, nous nous garons près du nouveau lotissement et abordons le village à pied, en passant près du cimetière. Je reconnais la maison d’Aurélia, celle d’Anne-Sophie, la mairie-école où j’ai vécu, le monument aux morts, l’église. Le village est transfiguré avec ses brumes matinales et les dizaines de coureurs en tenue qui s’échauffent dans les ruelles. Devant la salle des fêtes une longue file d’attente est formée : ici, on s’inscrit plutôt le jour même que par correspondance, et les organisateurs devront reporter le départ d’un quart d’heure tant l’affluence est grande. Le temps d’un bon café chaud et nous arrivons au retrait des dossards du parcours de 9,5 kilomètres, fin prêts. Ou presque : « Ah bon, vous ne donnez pas d’épingles à nourrices ? » Je le sais bien pourtant que ce n’est pas la règle dans les petites courses, moi qui les collectionne dans mon sac de sport. Mais je n’y ai pas pensé ce matin… On parvient à s’en dégoter deux chacun, et on met le dossard bien en évidence car il n’y a pas de système de puce pour compter les chronos. A la place d’un sac de goodies, les coureurs reçoivent une bonne bouteille de bière artisanale locale : ça c’est une organisation qui sait recevoir ! 🙂

On se dirige vers la ligne de départ, devant l’église, et c’est peu dire qu’on manque d’échauffement : on aurait dû trottiner davantage. La brume ne se lève pas, et restera présente tout au long de la course, transformant les paysages en décors de légendes telles que les racontait Madame Gabouty, l’historienne du village, avec ses feux follets, ses grottes secrètes, ses pierres guérisseuses et ses esprits farceurs. Bruno est venu encourager Aurélie. Blessé, il ne participera pas au trail, mais il fera quelques foulées (en jean !) sur la fin du parcours avec nous. Sébastien est également bien là, au départ des 24 kilomètres.

Où est Marko ?

Au départ les coureurs se lancent dans la descente comme s’il s’agissait d’un 10 kil’ roulant ; nous essayons de nous retenir mais ce sera trop rapide pour Aurélie qui aura tout de suite le galopant au taquet. On s’enfile assez vite dans un sentier, mais je ne regretterai pas d’avoir choisi mes New Balance 1064 pour l’occasion, car nous croiserons peu de grosse boue et que les passages sur route m’auraient vraiment cassé les pattes dans mes chaussures de trail (elles ne perdent rien pour attendre, les Columbia Ravenous version 2011 connaîtront leur baptême de glace le week-end prochain, au cours du Snow Trail de l’Ubaye !)

Tous derrière et elles devant... mais pour combien de temps encore?

A partir du deuxième kilomètre, ça grimpe, et pour longtemps. On marche pas mal et cela me rappelle ces dimanche de mon enfance avec le club de rando, où je pestais comme une sacrée diablesse contre le sort qui m’obligeait à parcourir ces sentiers au grand air, alors qu’il y avait le feuilleton « Gym » à la télé et que j’aurais préféré savoir si l’héroïne allait remporter la victoire devant ses fourbes adversaires. Mais là je ne peste plus, je suis tellement heureuse entre mon amie et mon amoureux, dans les feuilles mortes, les bogues de châtaigniers, sur ma terre Limousine. Je remercie mes parents de m’avoir forcé à marcher les dimanches, de m’avoir appris à aimer les chemins creux et la mousse des sous-bois !

Après le premier ravitaillement du quatrième kilomètre, nous amorçons une descente qui sera de courte durée. On y croise des chevaux bien sympas qui prennent la pause devant l’iPhone de Noostromo. On aura effectivement l’occasion de faire de belles images de cette forêt brumeuse, et les organisateurs facétieux ont même pris le soin, en plus des balises, d’installer des pancartes « Paysages ! » assorties de flèches qui pointent… vers le brouillard 😉 Nous sommes déjà bons derniers, suivis par les baliseurs-balais avec qui nous échangeons quelques blagues.

Déictique dans les arbres

« Normalement ça devrait tout le temps redescendre », dis-je pour rassurer ma coupine pour qui les montées et les sentiers chaotiques sont un vrai chemin de croix. Que nenni, ça grimpe encore. Heureusement, un deuxième ravito nous attend, avec des carrés de chocolat noir très bienvenus (2 ravitos sur un 9,5 km, on ne va pas tomber dans les vappes !) On passe pour la deuxième fois à gué sur un petit bout de rivière, qu’on s’amuse à franchir à petits bonds sur les pierres.

Et hop !
Et voilà !

Le chemin devient plus large, c’est « le chemin de princesse » pour Aurélie, qui peut enfin prendre ses aises.

Le chemin des princesses

Nous amorçons la descente finale vers le village, et devant le cimetière je croise Zohra, notre ancienne voisine du village, qui gardait ma petite sœur (« Missy », pour ceux qui suivent ^^), qui connaissait tous les coins à champignons, qui savait faire du henné avec des feuilles de noyer et qui partageait le potager avec ma mère. Je m’exclame, je la salue, on s’embrasse, « Et ta maman, ça va ? Et ta soeur, ça va ? Oh, j’ai toujours une photo de vous dans mon salon ! » Elle a les larmes aux yeux quand nous prenons une nouvelle photo grâce à l’iPhone de Noos’ (merci Nicolas pour toutes ces belles images, c’est rare d’en avoir autant sur une course !) Les baliseurs-balais attendent sagement que toutes ces effusions s’achèvent, je salue Zohra et nous finissons la course… derniers !

Pour la petite histoire, ayant vu sur le site Internet de la course qu’il n’y avait que 12 seniors femmes inscrites sur le 9,5 kilomètres, je m’étais dit qu’un podium était possible… Mais je préfère courir avec mes amis que de les laisser sur le coin de la route pour faire ma petite perf’ à la noix. Ce sera donc un podium inversé en 1 heure 20, mais du « bon temps roulé », comme on dit en Louisiane !

A l’arrivée c’est le festin (Eh bé oui ! On est en Limousin quand même !) avec une soupe aux légumes faite maison (et les participants des 24 kilomètres auront même droit à un sandwich au fromage, les veinards !) Je retrouve Cathy, la mère d’une amie d’enfance, montée sur la place tout spécialement pour me voir. On finit en beauté « Chez Gabeau » (oui, le propriétaire a changé mais pour moi le café au coin de l’église sera toujours « Chez Gabeau », là où j’achetais mon Mickey Magasine et mes Frizzy Pazzy) avec une petite bière.

De grands mercis aux organisateurs et bénévoles de cette course, superbe, très bien encadrée et très bien balisée. Leur enthousiasme est beau à voir et cela m’a donné une idée à long terme : pourquoi ne pas organiser une course « Runnosphère » un jour, dans un coin qui nous est cher et que nous aimerions faire découvrir ? Certes, cela doit représenter un investissement énorme, sans doute un an de travail, mais quel aboutissement !

PS : Pourquoi tu cours ? Pour retourner à la terre d’enfance.
PS 2 : On va ajouter quelques photos prises  par Bruno, elles sont magnifiques !

Les autres comptes rendus de course de la Runnosphère ce week-end :

Noostromo (trail des Monts et Merveilles)

– Runnosphère (Raidnight 41)

Virginie (Raidnight 41)

Runmygeek (Raidnight 41)

– Doune (foulées de Vincennes)

– Salvio (foulées de Malakoff)

Laquathus (foulées de Vincennes)

Danse-moi vers la fin de la poudreuse (conte de Noël)

Cette année, le père Noël m’a offert un champ de neige. Le cadeau a déboulé au détour d’un chemin encore inconnu, alors que je ne savais pas exactement où mes pas me menaient. En ce samedi 25 décembre, première réveillée de la maisonnée (y’a pas d’enfant dans l’histoire, hein, sinon ça aurait été 7 heures du mat « les cadeaux, les cadeaux ! ») je me sentais assez en forme pour une petite sortie running dans la neige, malgré la tartiflette et la Mondeuse de la veille.

Lorsque j’étais venue chez  mon père en août dernier, j’avais repéré un petit chemin qui partait de la ville et venait serpenter à côté du Chéran, le cours d’eau en contrebas. Je me suis donc mise en route à sa recherche, à travers les rues ni grattées, ni déneigées du matin de Noël. Je savais qu’il partait du stade mais j’ai mis un moment à le trouver. J’avais oublié la ceinture cardio à Paris, j’ai donc essayé d’écouter mon souffle pour ne pas trop monter dans les tours. Objectif 45 minutes en endurance fondamentale (j’en ris sous cape… j’ai fait gaffe, mais j’ai tout fait sauf une séance sérieuse !)

Ces tours et détours du début m’ont permis de découvir que les Hauts-Savoyards ne manquaient pas d’humour: sur une plaque de nom de rue, « Chemin du Bron », un petit malin avait ajouté un « x » au marqueur blanc, transformant la petite voie tranquille en royaume des Gangsta’

Wesh wesh, c'est trop frais !

Après avoir rebroussé chemin, j’ai enfin découvert le chemin derrière le stade. Immaculé, au moins 15 ou 20 centimètres de neige sans une trace de pas.

C'est parti mon rösti !

La neige était fraiche et épaisse, j’avais du mal à soulever mes pieds, mais quel bonheur ! J’avais beau être en New Balance de route, ça accrochait bien, je ne me sentais pas instable. Le seul souci étant que je ne pouvais pas savoir ce que ce petit pervers de chemin neigeux cachait sous son blanc manteau: quelques pierres, quelques terriers ont sollicité mes chevilles, mais pas de mal. Je sens encore un peu mon tibia  droit sensible, donc je fais attention (eh oui, parce que la morale de l’histoire de la blessure était que finalement, j’en cumulais trois: inflammation du tendon tibial, élongation du mollet, et périostite… c’est la fête !)

J’ai alterné phases un peu intenses de labour de poudreuse avec des arrêts de stupéfaction et d’émerveillement devant la beauté du paysage. Tout était fabuleux: les plans larges, avec la rivière en contrebas, et les détails des flocons suspendus sur les branches des arbres en sommeil.

Fond d'écran Windows. Tiens, faut que je la propose à Ségolène pour son site Web.

Le chemin continuait derrière des habitations. Ni vue, ni connue, j’ai poussé quelques barrières pour continuer ma route. Et soudain, au débouché du chemin, un grand champ. Tout blanc, juste magique comme un cadeau inattendu. J’avais de l’excellente musique dans les oreilles (la compil’ Télérama 60 ans de musique en aléatoire, complètement délirante), c’était plus que ce que mon coeur pouvait supporter en restant calme. Je me suis mise à courir comme une lionne (dans la neige, oui, une lionne dans la neige), je m’arrêtais essoufflée, je me mettais à danser (je vous jure, dans la compil’, y’a même « Oups, I did it again » de Britney Spears…), je faisais des grands sauts, des balancés de jambe comme j’ai vu faire les sprinter en PPG, des talons-fesses, le tout en chantant à tue-tête. J’ai atteint le sommet de la montagne de la bêtise lorsque j’ai eu soif: « Tiens, je vais manger de la neige, ça me fera de l’eau. » Horreur et damnation ! La neige avait un vieux goût de clope avariée, beuuuurk ! C’est bien un truc de parisienne, ça, bouffer la neige! On ne m’y reprendra plus.

Merci père Noël !
C'est beau une NB enneigée

Cette sortie a confirmé mon amour inconditionnel de la neige, même s’il est beaucoup plus difficile de courir dans ces conditions. Je suis impatiente d’aller dans la vallée de l’Ubaye en février pour le Snow Trail avec quelques copains du Taillefer Trail Team!

A présent que tout le monde est levé dans la maison, je vais clore ce billet, pour profiter de la présence de mes proches… Autre cadeau de Noël immatériel et merveilleux: hier soir l’un de mes cousins Vosgien parti vivre à La Réunion m’a fait signe sur ce blog, il est fan de CAP, de trail et d’ultra depuis 18 mois… elle est pas belle la vie ?

Allez mes petites, on rentre à la maison. Vous avez bien bossé aujourd'hui.
Flash back: la rivière à la fin du mois d'août

PS: Pourquoi tu cours? Pour ces moments de folie.

PS2: les données Garmin ici, ne vous fiez pas à la moyenne pourrie, sur la route du retour j’ai été interrompue par un coup de fil et j’ai oublié de couper le chrono des 5 dernières minutes… plus tout le reste (les photos, l’émerveillement, la danse de la poudreuse ^^) Tiens au fait, le titre du billet est lié à une chanson de Graeme Allwright.

Boğazı view (3/3): Kennedy caddesi

Ce matin-là il faisait beau. Le Bosphore était bleu comme le ciel et le ciel bleu comme la mer de Marmara. La fonction « Explore » de Garmin Connect ne s’était pas trompée: la route Kennedy qui encercle la péninsule antique est un endroit merveilleux pour courir.

Avec Monsieur M., nous avons pris le tramway depuis le parc de Findikli d’où j’étais partie la veille en remontant vers le nord. Là, direction le sud, jusqu’au palais de Topkapı (prononcer « Topkapeu », en raison du facétieux « i sans point » de la langue turque). Je branche la montre à l’entrée du parc du palais, que nous traversons en marchant. Arrivés au Bosphore, je m’élance, le fleuve à ma gauche et la mer devant, la ville dans le dos. En réalisant un aller retour, je profiterai des deux vues, revenant face à la cité.

Certes il y a des voitures, mais comparé au parcours de la veille, elles sont loin. Une large bande de bitume permet aux promeneur de déambuler et aux pêcheur de pêcher. En ce dimanche matin, tout est calme. Je croiserai deux coureurs, dont l’un en train de s’étirer. Une femme voilée s’amusera à me taquiner en changeant de trajectoire plusieurs fois pour se mettre sur mon chemin, mais son bon rire et son regard franc ne laissera pas de doute sur ses intentions dénuées de méchanceté. On m’invitera à boire le thé et à jouer au tir à la carabine sur les ballons installés dans les roches. Je déclinerai poliment, non sans m’être arrêtée pour ne pas faire ma rustre, et prendre quelques photos.

Kennedy Caddesi - Vendeurs de thé

J’ai beau être heureuse de courir ici, je souffre. Mon mollet droit recommence à me tirailler au même endroit, sur le côté, mes jambes sont en plomb. La reprise est très dure, j’ai l’impression de me retrouver plusieurs mois en arrière, à mes tout débuts. J’essaye de ne pas aller trop vite, pour tenir le plus possible. Puis quand une rupture de parcours surgit dans le paysage, j’en profite pour marcher un peu.

La route Kennedy est à un moment (kilomètre 3,8 si j’en crois la Garmin 😉 ) bordée par un parc fréquenté par les familles stambouliotes, à l’abri de la Mosquée Bleue. On y trouve des jeux pour grands, qui sont en fait des machines de gymnastique en plein air, plutôt amusantes.

Kennedy Caddesi et Mosquée bleue
Kennedy Caddesi et jeux pour les grands

Comme la veille les pulsations sont hautes, environ 185 ppm quand je cours aux alentours de 10km/h. Mais les sensations ne sont pas très bonnes, ce qui pourrait expliquer cela. Il va falloir que je replanche sur la question du mollet. A l’écoute de mes ressentis, un verdict tombe: ce ne sont pas seulement mes chaussures de ville qui sont trop petites, il semblerait que mon pied gauche est également un peu compressé dans les Asics. D’où, sans doute, le mollet gauche à la ramasse, kilomètre après kilomètre. D’autant que les lacets Xtenex renforcent cette sensation de pression, même si je les ai réglé au plus large possible. Les derniers deniers de mon anniversaire partiront donc dans une nouvelle paire de pompes (samedi prochain, direction Team Outdoor !)

Je suis allée, courant-marchant, jusqu’au quartier portuaire de Yenikapı. L’une des raisons pour lesquelles j’avais envie de poursuivre mon chemin était liée à la volonté de créer une nouvelle trace sur la carte Garmin, pour vous montrer jusqu’où la route était belle. En réalité, une fois le port contourné, le bord de mer accessible se poursuit encore sur plusieurs kilomètres, au milieu d’un parc. J’ai préféré rester sage, ménager mon mollet et retrouver Monsieur M. Après ces émotions sportives, une terrasse au soleil nous attendait, avec un bon plat de côtelettes d’agneau à la purée d’aubergines !

Mer de Marmara

PS: Pourquoi tu cours ? Parfois, quand la reprise est difficile comme maintenant, je me pose la question dans le mauvais sens du terme. Pourquoi continuer à courir si chaque progrès est remis en question au moindre arrêt, à la moindre blessure ? Mais je continue d’espérer que mon corps n’a pas oublié les entraînements des mois précédents, et qu’une fois allégée de ma douleur (et des 3 ou 4 kilos repris à Istanbul… comme je les sens, cette fois-ci !) , je repartirai de plus belle pour atteindre dans 4 semaine mon nouvel objectif : améliorer ma vitesse sur les 10km du Havre.

PS2: Merci à tous pour vos conseils avisés dans les commentaires du billet précédent. Grâce à vous, je progresse dans la connaissance ! Vos réponses m’évitent par exemple de poser une question destinée à la gente féminine « Est-ce qu’on peut poser la ceinture du cardio par-dessus le sous-tif ? Parce que ce serait quand même plus confortable… » S’il faut tremper le bizmuth dans de l’eau pour une meilleure électrolyse, j’en déduis que sur l’élastique ça ne servirait à rien !

Et le lien vers l’activité :
http://connect.garmin.com:80/activity/embed/54306872

Boğazı view (2/3) : Taksim-Boğazici Köprüsü

Istanbul est une ville où les trottoirs sont désarçonnants. Soit il n’y en a pas, et la rue se partage entre automobiles et piétons, à la grâce de Dieu ; soit ils sont matérialisés de façon très subtile (trop subtile pour les voitures, même si ce sont des plots) ; soit ils sont tellement usés qu’ils transforment en trail la moindre promenade urbaine.

Ce matin je suis partie en direction du nord, le long du Bosphore (Boğazı, en turc), pour ma première sortie depuis l’arrêt dû au mollet pas bien vaillant. Pour tester sur le terrain la Garmin Forerunner 110, également. Manque de bol, la partie la plus intéressante du parcours indiqué par l’ami de mon collègue était assez lointaine, et au bout de 5 kilomètres j’avais vécu assez d’aventures tumultueuses pour avoir envie de rentrer — en bus !

Grâce aux conseils de SebRom et de Salvio, je me suis dépatouillée pour lancer le bizmuth (non, non, c’est pas du turc). Une fois la ceinture cardio attachée, c’est finalement assez simple : bouton « menu » pour trouver les satellites, bouton « start » pour commencer l’activité. Monsieur M. ayant chopé une bronchite dans l’avion, il m’a simplement accompagné (et filmé) au départ, on s’est ensuite retrouvés à l’hôtel. J’ai lancé le bismuth dès qu’on a mis le nez dehors, je voulais voir les différences en termes de fréquence cardiaque entre la marche et la course… eh bien j’ai vu ! On a descendu des dizaines de marches depuis le quartier Taksim, croisé quelques chats, et j’ai commencé à courir à partir du parc Findilki.

Comme je le dis si bien dans cette vidéo (c’est un peu mystique, le son se coupe au bout de quelques secondes, ensuite ça tient du film muet), je ne suis pas encore partie que je suis à 114 pulsations par minute. C’est haut ! Emotion du premier test, de la ville inconnue, du trafic déjà dense ? Echauffement aux escaliers un peu tonique ? Toujours est-il que lorsque je vais me mettre à courir, je me situerai vite autour des 180 ppm, et même atteindre le chiffre très bizarre de 102% de ma fréquence cardiaque maximale (toute théorique, visiblement). J’aurais dû avoir la main moins lourde sur les loukoums.

Bon, en même temps, avec le rythme que j’ai tenu, on ne peut pas dire que j’en ai fait voir à mon coeur. D’abord la reprise fut rude: les mollets sont au chaud dans leurs Boosters, mais je sens un petit point à droite (en fait, j’ai toujours senti ce point, si j’y réfléchis bien). Rien de grave, mais ensuite c’est l’avant des tibias qui fait des siennes et me plombe les jambes. Pour ne rien arranger le terrain n’est pas idéal: certes il y a un départ au bord du fleuve, mais je dois assez vite remonter sur la route principale. Il y a bien un large trottoir (c’est assez rare pour le noter), mais à côté les voitures passent à toute blinde, puis les flics arrêtent la circulation automobile et piétonnière sans que l’on sache vraiment pourquoi, enfin je dois contourner des palais somptueux sans pouvoir en passer la porte.

Çirağan Sarayi - A la porte

Pour mémoire, voici ce palais de Çirağan, vu de nuit depuis un bateau sur le Bosphore. Aujourd’hui reconverti en hôtel de prestige, il faut débourser un minimum de 500 euros pour pouvoir s’y aventurer.

Çiragan Sarayi depuis le Bosphore

Après un coup de fil à Monsieur M., je reprends quelques forces et commence vraiment à me faire plaisir, tant pis pour le trottoir, pour les piétons interloqués de voir cette fille en veste au liseré vert fluo bondir entre les pavés, tant pis pour les voitures en vrac. Je cours et je me sens enfin bien, et je sais qu’après cette sortie, toute ridicule soit-elle, je me sentirai encore mieux.

Arrivée près du mythique pont du Bosphore, ouvrage suspendu entre l’Europe et l’Asie, un autre piège m’est tendu: Orkatöy, ancien village de pêcheurs devenu quartier de marché artisanal, avec des petites ruelles colorées, des étals de fruits et légumes, des bancs, des gens paisibles, le tout sous la majesté du pont et de la mosquée Mecidiye… Franchement, qui aurait envie ici, à ce moment-là, de courir ?

Ortaköy. Pêcheurs.
Ortaköy - Farniente
Ortaköy - Mecidiye Camii

J’ai préféré rentrer pour rester sur ces belles sensations et conserver en moi l’envie de courir, demain peut-être. Demain sûrement, dans un quartier plus accessible, entre le Bosphore et la mer de Marmara, autour de la péninsule historique de la ville. Un lien partagé par SebRom, via la fonction Explore de Garmin Connect, me permet de faire l’hypothèse que cette route Kennedy Caddesi longeant directement le Bosphore (sans méchant palais somptueux à contourner 😉 ), peut être intéressante. Reste à mettre à l’épreuve du terrain cette supposition.

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PS: Pourquoi tu cours ? (Soyons terre-à-terre…) Pour réduire le pneu qui s’est réinstallé, à grand renforts de gastronomie turque et de triple Whooper.
PS 2: Conclusions sur la Garmin après cette première sortie: très pratique d’usage, rendus Web sur Garmin Connect intéressants, le seul inconvénient étant qu’on ne peut pas avoir sur le même écran le chrono et la FC… En même temps, vu sa taille (et je n’aurais pas pu prendre plus gros !), c’est déjà très bien. J’aime bien également le « bip » à chaque kilomètre parcouru, mais peut-on éviter de devoir appuyer sur « ok » à chaque fois ?

Ci-dessous le lien vers la page de mon activité, je n’ai pas réussi à trouver le moyen de l’intégrer à ma page, je ne sais même pas si c’est faisable étant donné que ce blog est hébergé chez son éditeur.
Autre question subsidiaire: peut-on se faire sa propre bande de « runner buddies » sur Garmin Connect ? Y-a-t-il quelque chose qui ressemble à un réseau social, comme c’est le cas sur Runkeeper ?

http://connect.garmin.com:80/activity/embed/54006352

Boğazı view (1/3)

Istanbul à la fin du jour. On se sent déjà loin, entre deux rives, comme embarqué dans un roman. Les rues ne sont plus tout à fait les mêmes, moins de trottoir, plus de gens, plus de musique et un trafic monstre. Des chats, des poissons, des bagnoles et des hommes. Sous le pont Galata, on s’installe pour fumer la chicha, boire un thé et regarder le temps passer. Le va-et-vient des deniz otobüerlı (bus de mer) est à son comble, en pleine sortie des bureaux. A nos pied serpente la Corne d’or, cet estuaire qui sépare la ville européenne en deux péninsules.

Le workshop auquel je participais est fini, il a été riche en pensées et en rencontres, comme cette ville que je devrai déjà quitter dans deux jours. Je n’ai pas encore eu le temps d’aller courir, mais un frère Dominicain runner m’a indiqué par le biais d’un collègue un endroit pour longer le Bosphore à petites foulées. Je m’y lancerai demain, accompagnée par Monsieur M. qui m’a rejoint ce soir.

Ce sera l’occasion de tester le cardio-fréquencemètre GPS, si toutefois j’arrive à le faire marcher sans mode d’emploi (je l’ai oublié en France). Ce sera également l’occasion de me remettre en mouvement, après une semaine complète d’arrêt. Un footing de touriste auprès du Boğazı tumultueux, en espérant que les douleurs ne reviennent pas sitôt le pied posé à terre — le nazar boncuğu (amulette bleue protégeant du mauvais oeil) que je porte sur un bracelet devrait me prémunir des tendons fourbus. L’air de rien, j’accorde une certaine importance à ce type d’amulette car juste avant de passer mon permis, j’en ai trouvé une par terre dans une station service… Plus c’est incongru, plus j’y crois ! 😉

PS: Pourquoi tu cours ? Pour mettre à l’épreuve mes croyances.

Bon baisers de Trento

Je suis en Italie depuis mercredi soir, pour un colloque de sociologie des sciences et techniques où je présente quelques résultats d’une enquête ethnographique sur la conception d’une application mobile.

Et comme chaque fois que je me déplace plus d’une journée, je voyage avec mes affaires de running. Dès le lendemain de mon arrivée, je suis allée rejoindre les rives de l’Adige pour un petit jogging de reconnaissance, pour voir la brume se lever vers la montagne et sentir le soleil réchauffer mon corps à peine réveillé. J’ai recommencé ce matin sur le même parcours, croisant d’autres joggers, des promeneurs de chien, des promeneurs tout court.

Il s’est produit une chose étrange, et ce dès les premières foulées. J’avais une conscience pleine et totale de tous mes mouvements, de chaque pas sur le chemin de terre bordé d’herbes hautes. C’était comme si j’habitais dans mes pieds, dans mes jambes, dans mes bras et dans mon souffle. Peut-être parce que je me concentrais particulièrement sur le sol : j’avais failli me viander jeudi matin en mettant le pied dans une ornière cachée par les herbes. Ça aurait pu mal tourner : j’ai senti ma cheville résister, mon genou encaisser, mais pas de mal, ouf!

En tout cas ce matin j’ai couru prudemment pour éviter les terriers de René la taupe — la fédé d’athlétisme a décimé ses collègues pour qu’il nous en veuille autant ? Mon regard alternait entre les cimes qui m’entouraient, le téléphérique qui grimpait, et la terre, le sable, les bouts de bois flotté, le fleuve suivant irrémédiablement son cours.
C’est ce que j’appelle, dans mon jargon de newbie, un « footing de touriste » : je ne me soucie pas de l’allure ni du kilométrage effectué, même si je branche Runkeeper. Seules comptent les sensations, la découverte et la régularité que cela me permet d’entretenir dans la pratique de la course à pied. Runkeeper, malgré le GPS un peu aléatoire de l’iPhone, me permet surtout de regarder a posteriori les cartes de ces petits moments passés en dehors des sentiers routiniers.

Et vous, est-ce qu’il vous arrive de courir de temps en temps sans souci d’allure ou de kilométrage ?

PS : « Pourquoi tu cours ? » « Pour voir comment va le fleuve à 7 heures du matin. »

Et pour regarder la carte, les photos, le parcours, c’est ici : http://runkeeper.com/user/ClaraL/activity/15890643