Mois : août 2010

Zatopek

Ce week-end, je suis partie en Haute-Savoie. Non, pas pour disputer l’Ultra Trail du Mont Blanc, cette course mythique de haute-montagne annulée samedi puis reportée au lendemain avec modification de parcours — décision des organisateurs qui aura fait couler beaucoup d’encre dans les vallées.

Je ne vous parlerai pas de mon Ultra Randonnée de 2,91 km sur le massif du Grand Bornand, parcourue à raison de 37 minutes par kilomètre, sous la pluie, le vent battant, avec ma famille sous-équipée (non, les Converses, même montantes, ne sont pas de bonnes chaussures de marche 😉 ). Je ne vous parlerai pas non plus de mon footing du lendemain, 50 minutes le nez en l’air à 5,5 km/heure (oui, je vous jure que je courais, parfois).

Par contre, bourlinguer m’a permis de lire — dans le train, au rythme lent des voyageurs. Avant de partir, j’ai acheté Zatopek — le magazine, pas le coureur tchèque! Après nombreuses lectures de magazines consacrés à la course à pied, celui-ci me semble le plus abouti — c’est un trimestriel, ils ont le temps de fignoler — mais aussi le plus drôle.
Au premier abord, quand je l’ai découvert au début de l’été, il m’est tombé des mains. J’étais dans un Relais H en attendant le train des vacances, je l’ouvre et tombe sur la page 24 : des formules mathématiques, des courbes logarithmiques — le calcul de l’indice d’endurance… il n’en a pas fallu davantage pour me sentir larguée.
J’apprendrai plus tard, en lisant l’article en profondeur, qu’il s’agissait du seul paragraphe épineux de tout le magazine. A tel point que le rédacteur conseille à ses lecteurs en bisbille avec les chiffres d’aller voir directement au paragraphe suivant. Finalement je l’ai lu, ce n’était pas la mer à boire, en se concentrant un peu. Avec ma formation de lettres et sciences sociales, et même si Monsieur M. est un fondu de mathématiques, je recule trop souvent face aux murs de nombres (et au mur de brouillard sur le massif du Grand Bornand, mais ça c’est la sagesse, pas la peur).

En quelques mots, voilà pourquoi selon moi « Zatopek » est génial.

• Il nous rend intelligent. Ça se sent dès l’édito, dans lequel le rédac’chef aborde ses lecteurs par une question aussi physiologique que philosophique : « Qu’est-ce qui différencie une plante d’un animal ? » [pour savoir la réponse, lisez « Zatopek » n°15 ! 😉 ] Il parvient à dresser les grandes lignes du contenu du magazine tout en devisant sur les mots et notre rapport aux choses qu’ils désignent.

• Il n’est pas bardé de publicité. Il y en a bien sûr, mais leur proportion est limitée par rapport aux articles de fond. En matière de course à pied, je ne suis pas anti-pub. Je suis même friande de connaître les nouveautés du moment. Ici-même, je n’hésiterai pas à appeler un KitKat un KitKat. Mais point trop n’en faut. Le plus impressionnant, dans « Zatopek », est ceci: lorsqu’un bouquet d’épées s’abat sur le courrier des lecteurs pour dénoncer l’apparition du logo d’une boisson controversée, ils se fendent de quatre pages « pour ou contre le Red Bull ».

• Parce qu’il est engagé sans être fanatique. J’ai ressenti une fine alliance d’opinions fermement défendues et d’absence de crispation partisane. L’article sur l’hydratation souligne les excès commis par les diététiques sportives — en passant à l’occasion par une savoureuse citation de Mark Twain — mais présente chaque méthode dans sa perspective historique. Et dans les huit pages consacrées aux coureurs pieds nus, jamais je n’ai perçu de prosélytisme du type : « c’est trop cool, tous au barefoot ».

• Il est pluridisciplinaire. Et ça, c’est ce qui me fera signer le formulaire d’abonnement. Je vous ai déjà parlé des maths, de la culture littéraire au détour d’un article sur la physiologie, de l’histoire omniprésente comme outil de mise en perspective. Eh bien ce n’est pas tout : au lieu du sempiternel portrait mannequin-coureur-trop-high-trop-happy, on a un tableau de Magritte (p. 42). Et une analyse point par point d’une photographie mythique, celle de la victoire de Bikila aux JO de Rome en 1960. Sans oublier l’anthropologie (une réflexion autour du livre « Manthropology » sur les supposées performances de nos lointains ancêtres) ou la psychologie — avez-vous déjà vu… un potomane sur un marathon ?

• Et en plus c’est bien écrit. Les sujets sont traités sur la base d’articles et de controverses scientifiques les plus récents, tout en conservant une langue tantôt tranchante (« La méthode Brambilla ne vaut rien! »), tantôt magnifique — je pense à l’article sur les produits dopants. Quant aux légendes des illustrations, elles n’ont rien à envier aux plus grands titres de « Libé ». « Régina Jacobs court en bleu. »… elle porte effectivement un maillot bleu, mais elle est également connue pour tricher en s’aidant du Viagra, la fameuse pilule bleue.

… Un petit bémol, pour nuancer cette recension dithyrambique ? Une lectrice s’en charge, réclamant davantage d’articles consacrés à la physiologie féminine de la course à pied. J’approuve, je like, je plussoie ! Et s’il vous plaît, pas de « courir pour maigrir »!..

Et vous, quel est votre magazine de running favori ?

PS : « Pourquoi tu cours ? » « Parce que ça entretient ma curiosité. J’ai même réussi à comprendre des maths. »

First Timer (2)

Toujours est-il que depuis, deux à trois fois par semaine, je cours. Seules de petites blessures m’ont arrêtée quelques temps, mais j’ai pris le parti de les respecter car elles en disent beaucoup sur moi-même.
Sur la ligne de départ, personne n’est égal, mais je débute avec du pénible : zéro passé sportif, genus valgum (en français dans le texte : les genoux cagneux), hallux valgus (alors ça ce sont les gros orteils qui poussent les autres petits), un retour veineux poussif, sans parler du pneu qui ceint ma panse (pas bien terrible, mais disons que je ne ressemble pas aux gazelles élancées qui hantent les tartans). Et même si c’est « cerise sur le cheesecake », je ne cours pas dans le but de mincir.
Comme Aurélie de Wanarun, [ici j’ajouterai un lien vers ce magnifique site, mais voyez-vous, je teste l’appli iPhone de WordPress entre deux trains, donc on verra ça plus tard!] je suis assez saoulée de l’image féminine qui se dégage des magazines de course à pied : pas de chrono en vue, un footing de temps en temps, et courir pour maigrir…
Mais revenons à Beaublanc (le stade de Limoges!) Je ne me souviens plus de la marque des chaussures que m’avait prêté Aurélie (de Limoges, pas de Wanarun!) mais je me rappelle de la sensation de fierté au moment de revêtir des habits spéciaux, des chaussures spéciales (« p… ça-y-est, je fais du sport !!)
De retour chez moi, dès le lundi de Pâques, j’ai filé chez l’équipementier le plus proche. Je voulais des pompes sérieuses mais modestes, pas bardées de technique genre je-cours-le-marathon-dans-un-mois. J’ai opté pour des Asics, foulée universelle, et je les trouve à l’usage formidables.
Ma crainte d’alors: me faire mal bêtement, me dégoûter, jeter l’éponge. Je file donc chez un médecin du sport qui me conseille d’y aller mollo (j’en étais déjà à ma 4è séance au bout de la première semaine!) et me recommande un podologue. « Il est très bien, il vous conviendra. » Tu m’étonnes! Mon podologue court le marathon, et il adore parler course à pied ! Me voilà pronatrice, les douleurs aux tendons de la patte d’oie expliquées par mes genoux (et par plein d’autres choses dixit mon osthéopathe, qui partage le cabinet avec le podo). Et une jolie paire de semelles à glisser dans mes godasses…
En me baladant de blog de running en magazines de CAP, j’ai appris l’existence d’une spécialité de coureurs : les « barefoot ». Comme leur nom l’indique, ils courent pieds nus. Enfin, pas toujours. Un fabricant a inventé une super chaussure, avec un look de gant de pied : la Vibram Five Fingers. Et je peux vous dire qu’avec mes orteils dessus-dessous, je fantasme à fond sur ces pompes, non pas pour courir (ni pour aller au travail…) mais pour me glisser dedans à la maison !

Et vous ? Comment vous chaussez-vous pour courir ?

PS : « Pourquoi tu cours ? » « Parce qu’au bout de 20 minutes on voit la vie en rose. »

First timer (1)

La première fois restera pour moi avril 2010, ce dimanche de Pâques où entraînée par la ferveur d’Aurélie, j’ai trottiné bon an, mal an autour du stade Beaublanc à Limoges [moment immortalisé par Monsieur M., que je remercie !].

Mais ces premiers pas s’appuyaient sur un bon souvenir: le cross du collège en 3è — aucune idée du kilométrage d’alors — où j’avais glorieusement grimpé sur la troisième marche du podium. Le prof de sport remontait les bretelles à la 2è qui aurait pu finir 1ère, et félicitait la 3è qu’il n’attendait pas si haut. Il faut dire que cette concurrente était l’une des plus belles filles de la promo et sortait avec le garçon dont j’étais amoureuse. Durant toute la course, je ne lui ai pas lâché le train — après, je suis sortie avec son mec. Ajoutons à cela que le prof de sport était super mignon et que son pull sentait trop, trop bon. On peut voir qu’à cette époque, je savais après quoi je courais.

Aujourd’hui c’est bien moins clair. Pourquoi après un footing « 2 minutes de course / 2 minutes de marche » suis-je ensuite tombée là-dedans comme une abeille dans un champ de pavot ? Le plaisir pris lors de cette première séance y est pour quelque chose : discuter le bout de gras avec ma copine en sachant que je perdais un peu du mien, rigoler, s’époumoner… L’amitié qui me lie à Aurélie et l’assurance de partager à distance ce qui deviendrait une passion à coup de tableaux Excel :  minutes courues, minutes marchées, durée de la séance, du rose, du vert, des commentaires « Point de côté à la 17è minute, légère douleur au mollet, souffle OK et bonne pêche ». L’intuition que cette discipline allait m’apporter mon heure de délassement mental, mon pain quotidien du moral.

A suivre…

Une idée de jeu pour les billets à venir, sur le thème: « Mais pourquoi je cours ? »… A la fin de chaque épisode, une petite phrase sur les raisons qui me font mettre un pied devant l’autre.